lundi 1 janvier 2018

Journal de Bord 1er janvier 2018

Étonnement de constater que parmi mes amis la plupart veulent ignorer la connivence du Président de la République et d'un animateur de télévision vulgaire, ou la minimiser au prétexte que : 1) on ne sait même pas qui est cet individu et il ne nous intéresse pas 2) c'est peut-être un montage et une "fake-news" 3) il y a des choses plus graves que ça.
On peut toujours trouver plus grave : toute époque, y compris la nôtre, dispose en magasin, en temps réel, de tout un tas d'accessoires dramatiques. Non, ce qui interroge, c'est cette lente dégringolade calculée vers une nouvelle forme de populisme qui veut se distinguer de celle du "petit peuple" mais qui n'en reste pas moins une stratégie de la flatterie. Elle est conduite simultanément avec une volonté de dénigrer les journalistes (je les distingue des animateurs) "qui ne s'intéressent qu'à la communication et  non aux Français". Elle est portée par une communication et des discours surfant sur l'empathie ou l'humanisme, et une action au quotidien qui les contredit (les sans-abris, la politique migratoire, la politique sociale en entreprise, etc.) au prétexte de l'incontournable pragmatisme, avec l'argument de la démocratie (à la seule réserve près que M. Macron a été élu par seulement 43,6% des inscrits, sachant que l'abstention a connu un record (25,44%), et que 16% seulement de ses électeurs disent avoir voté pour son programme !).

"Sermon de Saint François d'Assise aux oiseaux et aux fusées" de Sébastien Lapaque

Le dimanche 4 janvier 2009, je postais sur ce blog le petit commentaire suivant dont la lecture, 9 années plus tard, en ce 1er janvier pluvieux et venteux ne m'a pas déplu.

Et si saint François d'Assise, le Francesco Bernardone, fils du riche marchand Pietro Bernardone, le "Poverello" qui à 25 ans quitta sa vie de débauche pour se mettre au service des plus humbles et des plus miséreux, miséreux lui-même, revenait aujourd'hui dans sa ville pour tenter de parler aux hommes, révolté qu'il est d'avoir appris depuis le paradis où il repose que la municipalité d'Assise a décrété au mois d'avril 2008 l'interdiction de la mendicité aux abords de l'église ?
Résultat de recherche d'images pour "sermon de saint françois d'assis"Serait-il plus entendu qu'il y a huit siècles ? Non, hélas, il n'y aurait vraisemblablement que les oiseaux pour l'écouter. Et qui sont ces drôles d'oiseaux qui sillonnent le ciel ? Des fusées ? La fusée Production à qui "François parle de tous les faux besoins qui, quotidiennement, rabaissent l'homme" ; la fusée Cupidité "qui organise un univers dans lequel la jouissance d'un milliard d'hommes sera payée par l'indigence de huit milliards d'autres" ; la fusée Désespoir lancée dans sa course vers "le Grand Nulle Part. Lancée par des hommes et des femmes qui ont trop calculé et trop accumulé, (...) qui n'ont fait que cela."
Cette petite (91 pages) fable, très simple, ponctuée d'accents de révolte, a le mérite en ces premiers jours d'"Annus Horribilis", de nous interroger sur le "toujours plus". Bien sûr, si on devait suivre aujourd'hui le sermon à la lettre, nous reviendrions plusieurs siècles en arrière et les thèmes des hérauts  de la décroissance sont (presque) derrière chaque phrase. Bien sûr, ça manque parfois d'analyse en profondeur (mais le lecteur n'est-il pas là pour bosser également ?).
Mais certains passages sont très beaux et donnent à réfléchir :
" Avant de savoir, de posséder, de se souvenir, il faut regarder (...) apprendre à habiter le monde pour qu'il cesse de nous apparaître étranger" (débat sur l'école dite "libre", par ex).
"(...) la rationalisation de la production, l'amélioration de la marge opérationnelle ne combleront jamais l'insignifiance et le vide dédiée à l'adoration des taux de croissance" (si tous les traders  du monde voulaient bien lever leur mains de leur claviers !).
"Ce qui a terrifié François de retour parmi nous, ce n'est pas la vanité de l'argent, du pouvoir et des plaisir qui nous occupent - elle n'est pas nouvelle -, mais la mort de la Beauté." (quand l'art s'humilie à exposer des animaux tronçonnés dans le formol).