jeudi 31 mars 2011

Souto de Moura, Pritzker 2011


Et de deux ! Après Alvaro Siza, c'est Souto de Moura qui vient apporter au Portugal une 2ème étoile au firmament de l'architecture. Assez méconnu en France, le nouveau Pritzker a essentiellement construit au Portugal.
Le stade de Brega en 2004 lui amène une certaine renommée internationale. Cet équipement sportif met en scène la frontalité de deux tribunes. On est loin du modèle de l'Aréna refermée sur elle-même. L'ensemble dont le dessin est à la fois élégant et rigoureux, semble faire corps avec le site rocheux - une ancienne carrière - dans lequel il est édifié.

Souto de Moura a produit également un grand nombre de maisons dont celle de la star du football : Cristiano Ronaldo (comme quoi, les footeux peuvent parfois avoir une certaine sensibilité !).

Souto de Moura attache beaucoup d'importance au mur en tant que dispositif propre à "écrire" l'espace. Il recherche également à concevoir des vues parfaitement cadrées sur l'espace extérieur. Ainsi, nombre de ces édifices présentent des volumes en forme de boîtes dont un seul côté est ouvert, parfois en élévation sur un socle, souvent en porte-à-faux.
Difficile de ne pas évoquer Mies Van der Rohe.
La tour Burgo qu'il a conçue à Porto est une merveille de précision et d'équilibre.
Le musée de l'artiste Paula Rego est étonnant : deux sortes d'immenses fours à chaux ,qui correspondent à des bibliothèques, émergent d'un ensemble qui serait "classique" s'il n'était pas d'une inhabituelle couleur rouge orangé qui rappelle le registre d'un Luis Barragan. L'audace est parfaitement maîtrisée ; définitivement, l'auteur est talentueux.

Bon, et maintenant : si on allait au Portugal voir tout ça ?

Hommage à Jean-Marie Charpentier


Le 28 mars dernier, en soirée, la salle Gaveau était pleine de proches et d'amis de l'architecte Jean-Marie Charpentier qui avait tiré sa révérence quelques mois plus tôt, en même temps que l'année 2010. Le crabe n'avait pas desserré ses pinces et une grippe scélérate s'en était faite la complice. Bach, Bartok, Brahms et Guo Gan - un compositeur et musicien chinois - ont porté magnifiquement nos regrets et notre nostalgie.
J'avais connu Jean-Marie en 1990. Il était l'architecte d'un siège social ; j'étais le conseil de la société pour laquelle ce bâtiment était réalisé. Nous étions donc dans des camps opposés. Opposés, mais pas adversaires ; et plus tard nous nous retrouvèrent dans le même camp : celui de la maîtrise d'oeuvre. Nous n'avons pas travaillé beaucoup ensemble, mais nous nous rencontrions régulièrement. Le Cambodge nous avait rapprochés. J'appréciais sa disponibilité et son humanisme. Il ne jouait jamais à la personne importante et affairée.
Je lui dédie cette très belle phrase de Mies van der Rohe : "Il est important pour toute époque, y compris la nôtre, de donner à l'esprit l'occasion d'exister."

dimanche 27 mars 2011

Téléscopage (retour)

Vu dans Le Monde de ce jour les excuses de Sylvie Kauffmann à propos de "juxtaposition malheureuse" de publicités et de photos. (voir petit mot sur ce blog il y a qq jours avec Sean Connery et le tsunami). Nous sommes donc plusieurs à avoir été "choqués" et quelques uns à l'avoir exprimé.

Veinard(e)s !

Et oui : on a (presque) tout changé à droite !

Tour Horizons ; questions.


C'est son deuxième nom ; initialement elle avait été baptisée par son auteur - le très médiatique architecte Jean Nouvel - la "Non-Tour". Mais, la connotation négative de l'appellation originelle fut abandonnée au profit d'un imaginaire plus porteur (quoique ...) : "Horizons" ; au pluriel (plus on est de fous, plus on rit ?).
Elle est sise aux limites du "Trapèze" de Boulogne-Billancourt, et de l'ensemble rugueux et populaire de la Cité du Pont de Sèvres.
Revenons aux origines ; pourquoi "Non-Tour" ? Parce qu'elle se présente, non comme un monolithe vertical classique, mais comme un empilement de trois bâtiments distincts (modénature, revêtement de façades, matière, épaisseur) à la manière d'une ziggourat dont la silhouette n'est pas sans évoquer le tombeau de Cyrus à Pasargad ; avec une sorte de serre façon Truffaut en pinacle en lieu et place du temple minéral...
En architecture contemporaine nous baignons actuellement dans le style "empilatif" : Vitra House d'Herzog et de Meuron à Bâle, New Museum of Contemporary Art de New-York des japonais de Sanaa, future médiathèque d'Angoulême de Françoise Raynaud, sans oublier le projet d'Edouard François à Champigny. Dans cet exercice, dont le côté ludique et juvénile n'échappera à personne, il est d'heureuses compositions et d'autres moins géniales...
Le traitement sculptural du bloc inférieur de la Tour Horizons évoque - au risque de la métaphore un peu lourdement appuyée - le jaillissement tellurique, l'origine brutale de la matière construite. Réalisé par un artiste rompu aux techniques de l'illusion par son travail aux Studios Disney, la sculpture du béton noir projeté est remarquable : on croirait véritablement voir et toucher la paroi rocheuse d'une falaise ancienne, ridée par le temps et lissée par les intempéries. Qu'en penserait Loos ?

Le second étage de cette fusée définitivement clouée au sol s'inscrit dans un registre totalement différent : l'architecte a mis en scène un damier aléatoire composé de boîtes élémentaires en revêtement de céramique de deux couleurs (blanc et noir), comme clipsées sur de longs bandeaux de terre cuite couleur brique. S'agit-il d'évoquer le passé industriel du lieu dans une réminiscence du matériau culte de l'industrie (la brique), et celle du processus d'élaboration des produits manufacturés issus de cette même industrie ? S'agit-il de faire transpirer sur cette façade le "génie du lieu" des anciennes usines Renault ? Mettre en scène quelques fragments d'une histoire sociale autant que romantique définitivement enfouie sous les m3 de béton ?

Le troisième et dernier étage adopte une façade de verre plutôt classique. L'originalité réside dans la forme de l'édifice : une cabane, une serre, dont le toit à double pente évoquant la chaumine traditionnelle peut constituer une provocation dans l'écriture d'un objet comme une tour. S'agit-il d'un post-modernisme revisité ?

Deux dispositifs sont à souligner : la possibilité d'accéder à des balcons arborés à chacune des ruptures horizontales de l'édifice, et le hall d'accueil traité comme une vraie cathédrale de béton évoquant d'avantage l'espace brut d'une salle des machines souterraines que celui d'un futur lobby de siège social. Au sujet de cet espace - véritable hymne au génie civil - c'est l'obligation d'amener la lumière au cœur d'un édifice d'une épaisseur non standard qui a conduit les concepteurs à imaginer un dispositif de type périscope. Une ouverture a été créée au niveau de la terrasse du second bloc, et la lumière est réorientée jusque dans les entrailles de l'édifice par une rampe réfléchissante. Ingénieux sans doute car cette épaisseur constituait un obstacle réel à l'usage de l'immeuble ; il n'en reste pas moins que cet espace résonne étrangement du mythe platonicien.

Jean Nouvel attache une importance capitale à la notion d'architecture contextuelle ; c'est à dire d'une architecture qui compose avec son environnement. Qu'en est-il à Boulogne au-delà des métaphores et des suggestions évoquées précédemment ? Y-a-t-il résonance avec le skyline boulonnais en général, et les tours du Pont de Sèvres en particulier ? Faut-il aller chercher un ancrage plus lointain à cette stratification dans le relief en terrasses des coteaux de la Seine, à l'horizon de Meudon ou de Saint-Cloud ?
Une chose est certaine : ce bâtiment "empilatif" ou "empilatoire" nourrira les polémiques ; n'est-ce pas, en définitive, l'une des fonctions cardinales de l'art ? Mais l'architecture, qui s'impose d'avantage aux citoyens - et jusqu'à la cité elle-même -, que les représentations des autres arts, ne doit-elle pas promouvoir d'autres vertus ?

Aujourd'hui...

"Aujourd'hui, on estime une personne sur ce qu'elle dépense et non sur ce qu'elle pense."


Merci à FL d'avoir pensé à Everybody Knows

jeudi 24 mars 2011

Frédéric Borel, Grand Prix National d'Architecture 2011


Attribué tous les deux ans, il s'agit de la plus haute distinction dans le domaine architectural en France.
Elle avait été supprimée puis rétablie il ya quelques années. Depuis, les lauréats ont été successivement : Patrick Berger (la Canopée des Halles), Rudy Ricciotti (le "pirate sudiste" ou le "voleur de poules", selon), Lacaton-Vassal (le Palais de Tokyo). Cette fois, c'est Frédéric Borel qui est couronné. J'aurais plutôt tablé pour une femme : Odile Decq ou Manuelle Gautrand. Le microcosme de l'architecture est encore très machiste sans doute !
Mais tout le monde doit être heureux que ça soit Frédéric Borel car c'est un homme d'une grande simplicité, timide, attentif, retenu ; non que ces qualités suffisent à produire une belle architecture, mais elles sont rares dans ce milieu où l'égotisme, l'inattention et le toupet constituent de plus surs viatiques pour une carrière. Rare également, son architecture est reconnaissable entre toutes.

Quand on considère la production de ces quatre lauréats, n'est-ce pas d'ailleurs ce que ce Grand Prix veut saluer : une route indépendante au-delà des coteries, une signature, un style.
Beaucoup de professionnels de l'architecture ou même seulement des amateurs, sans être des inconditionnels du "style Borel", se réjouissent aujourd'hui du coup de projecteur mis sur cette silhouette d'éternel adolescent, un sourire timide, un peu pincé au coin de la bouche, et la gentillesse comme carte de visite.

A noter que le jury de la nouvelle église orthodoxe russe qui s'est réuni la semaine dernière, aurait été bien plus inspiré de retenir le projet de Borel plutôt que la réplique improbable, issue d'un quelconque parc d'attraction, qui a été choisie.

Télévision

3H10 : c'est la durée moyenne d'écoute quotidienne de la télé dans le monde.
4H54 : c'est le record ; il est détenu par les pays du Moyen-Orient.
Les émissions championnes : la télé-réalité et le sport. Puisque nous avons du pain, le peuple n'a plus besoin que des jeux !

dimanche 20 mars 2011

C'est le Printemps !


Une guerre en Libye, un désastre humanitaire au Japon (séisme + tsumani + accident nucléaire), une guerre civile en Côte d'Ivoire, des snipers au Yémen qui tirent dans la foule, Haïti qui ne s'en sort pas, etc. la liste est longue des évènements dramatiques sur cette foutue planète qui accueille malgré tout, aujourd'hui, le Printemps !

jeudi 17 mars 2011

IPhoning







1 - Bassin à la Fondation Maeght
2 - Le camp du drap d'or à Rouen
3 - Cherchez le chat !

Téléscopage



Sean Connery est un acteur formidable, les Bahamas sont des îles vraisemblablement paradisiaques, et les sacs Louis Vuitton des accessoires très haut de gamme. Mais, si vous avez mon défaut qui consiste à commencer la lecture du "Monde" par la quatrième de couverture après avoir jeté un oeil sur la première page, il est difficile de ne pas être choqué par le contraste entre ces deux feuilles, dans le numéro daté du mardi 15 mars. Sur la gauche, une star dilettante coiffée d'un Panama de séducteur sur fond de plage de rêves, le bas du pantalon relevé - probablement pour se rafraichir les pieds dans les vaguelettes ; sur la droite, la détresse d'une femme seule, assise dans un décor d'apocalypse à Naori au Japon, ville détruite par le tsunami, le visage défiguré par le chagrin, les pieds et les jambes nus.
Bien sûr il faut de la "pub" pour faire vivre la presse quotidienne, mais est-ce trop demander à un journal comme "Le Monde" d'avoir ce supplément d'attention qui permettrait d'éviter un télescopage d'images de cette nature qui, non seulement me semble déplacé vis-à-vis des victimes japonaises, mais contribue à banaliser une certaine forme de cynisme dans laquelle notre société se complait.
Mais peut-être, après tout, est-ce une image assez symbolique de notre monde : d'un côté, ceux qui n'ont plus rien, et de l'autre, ceux qui ont tout ; y compris le superflu.

Gloire aux ingénieurs !



Tous les amateurs d'architecture connaissent la médiathèque de Sendaï de l'architecte Toyo Ito (Premium Imperial 2010, ce qui se fait de mieux comme distinction en architecture). Mais Sendaï est aujourd'hui connue du monde entier comme étant la ville la plus proche de l'épicentre du tremblement de terre dévastateur du 11 mars dernier. Une vidéo sur Internet montre comment cette immense bâtiment doté d'une structure métallique tubulaire audacieuse - treize cylindres en tubes d'acier assurent la stabilité verticale et horizontale du bâtiment - calculée selon les règles parasismiques, a remarquablement résisté aux secousses d'une violence rare (7,2 sur l'échelle de Richter).
Juste un petit hommage pour les ingénieurs qui ont su concevoir et mettre au point, aux côtés de Toyo Ito, cet exemple d'intelligence constructive.

Images de la médiathèque à retrouver sur le site Internet www.toyo-ito.co.jp

samedi 12 mars 2011

Veinard(e)s !

Les photos... à droite... et bien... on a (presque) tout changé ! Et maintenant les textes aussi !

Claudie Laks (peinture)

"Il y a deux oeuvres qui m’ont touchées plus que
d’autres : évidemment les « Nymphéas » de Monet que j’ai vus
pour la première fois au musée de l’Orangerie, et une oeuvre de
petite dimension que j’ai découverte très jeune en me
promenant au Louvre : le « Philosophe en méditation », alors
attribué à Rembrandt. Les premières m’ont terriblement
bouleversée d’abord par l’espace étonnant qu’elles produisent,
nous incluant dans leur lumière, mais aussi par leur double
présence, à la fois tactile et immatérielle à travers le jeu
complètement fou de la couleur. Le « Philosophe en
méditation » semble à l’opposé des « Nymphéas », petit format,
couleurs plutôt sombres et effet de clair-obscur, univers replié
vers une intériorité métaphysique, vieil homme penché sur un
livre entre la lueur diffuse d’une fenêtre aux vitres épaisses, et
celle du feu à peine perceptible d’une cheminée, escalier en
colimaçon à l’image d’une oreille à l’écoute... rien ne semble
rapprocher ces deux oeuvres. Et pourtant, pour moi elles se
rejoignent. Ce sont deux états d’un même souffle, d’une même
recherche, celle d’une concentration au monde pour que vienne
s’y révéler, ce qu’on peut appeler une grandeur, ou la grâce, et
tout cela avec tellement de discrétion, d’humilité…
"
Entretien Claudie Laks / Frédérico Alagna

C'est à une confrontation lumineuse entre des oppositions que nous invite Claudie Laks dans cette toile intitulée "Xénophon" : fulgurance et composition, oasis de couleurs primaires et arabesques quasi-calligraphiques, maelström et douceur, énergie et retrait. L'espace de cette grande toile (180x165) ouvre à la démultiplication des possibles ; elle s'érige en un palimpseste généreux où chacun pourra puiser de possibles vertiges.

Le MIPIM pour les Nuls !

Extraits. Le reste est consultable exclusivement sur abonnement !



Le MIPIM est une manifestation annuelle qui se déroule à Cannes début mars, en partie dans le Palais des Festivals, en partie à bord de somptueux yachts loués pour l'occasion, et en partie dans les salons des palaces de la Croisette ; et en partie ailleurs, mais on ne vous le dira pas car c'est confidentiel.
Curieux comme vous l'êtes (vous n'en seriez pas là sinon), vous vous demandez certainement ce que peuvent bien signifier ces 5 lettres. Sous toutes réserves : le "M" doit vouloir dire "Marché", le "I" : International, le "P" : Professionnel, et le "IM", allons-y pour "Immobilier". (...)

Dans ce petit monde féodal, les seigneurs de la guerre sont les investisseurs ; autrement dit ceux qu'ont le pognon. On va pas tourner longtemps autour du pot : dans l'immobilier c'est quand même le nerf de la guerre ! No pognon : no béton ! (...)
Catégorie juste en-dessous : le promoteur. Bien que l'imaginaire populaire l'ait affublé d'une sinistre réputation, le promoteur n'est pas systématiquement un affreux... (...)

Catégorie encore en-dessous : l'aménageur. C'est simple : l'aménageur est le contraire du déménageur...
Catégorie encore, encore en-dessous : l'agent immobilier. Profession : intermédiaire (et oui : il n'y a pas que dans le trafic d'armes !) (...)

Catégorie encore, encore, encore en-dessous : l'architecte. Les individus précédents rendent hommage tout haut à sa créativité et à son sens esthétique,(...)
Catégorie encore, encore, encore, encore en-dessous : l'entrepreneur. Surnommé "le bétonneux" par des esprits subversifs,(...)
(...) Catégorie oubliée : le bureau d'études (ou bet). Il n'a en général pas d'argent, aucun sens créatif ni esthétique, accepte d'être payé 20 à 30% moins cher que s'il était entrepreneur, et tout le monde se demande bien à quoi il sert (...)

(...) Le MIPIM représente du pain béni pour les traiteurs cannois, les chauffeurs de taxi, les hôteliers et les restaurateurs, les videurs, les sociétés de sécurité, et vraisemblablement...
En revanche les libraires et le personnel des musées peuvent partir en vacances à la période du MIPIM ; il n'y aura pas d'émeutes. (...)

Il est possible (pour les "seigneurs" exclusivement) de se détendre entre deux rendez-vous harassants (...)
Cette année - crise oblige - l'option "petite virée dans la ville sur la banquette arrière de la Bentley vernie blanche décapotable en charmante compagnie et avec ma grosse paire de... Ray-Ban" semblait avoir disparue du catalogue VIP.
Le MIPIM n'est plus ce qu'il était !

dimanche 6 mars 2011

Claudie Laks (collages)

Le travail de collage de Claudie Laks est une promesse d'optimiste et de bonheur. "Donner à l'esprit l'occasion d'exister", selon la célèbre phrase de l'architecte Mies Van der Rohe, pourrait "légender" ces arabesques lumineuses dont la déconstruction feinte et l'incertitude apparente servent une fiction qui offre au regard la tentation du rêve.

Extrait d'un entretien entre Claudie Laks et Frederico Alagna (entretien découvert après le texte ci-dessus) : "Parallèlement, la pratique du collage, par son aspect ludique, conservant comme fondement les jeux de la couleur mais intégrant la mise en espace par les découpes et évidements fait le lien entre peinture et sculpture. A cela s’ajoute le principe de la récupération de papiers déjà peints, souvent dérisoires, qui, à travers leur mise en espace improbable et aléatoire, font de mes collages à chaque fois un nouveau défi à la couleur sous forme de « ré-création ». J’aime ces petits bouts de couleurs perdues."

Photos amateurs

Il s'agit du "travail" d'un jeune (?) photographe amateur inconnu du grand et du petit public dont le timide talent est soumis à vos orbites cruelles.



Expo photo Bagatelle

Il s'agit de jeunes photographes. J'ai retenu 3 photos parmi plusieurs dizaines remarquables.
La 1ère illustre le dérisoire de la société consumériste et des marques ; la nature sera toujours la plus forte.

Evidemment la légende de la seconde devrait être : "je t'aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie..., pas du tout ..."

Le 3ème travail m'a tout simplement intrigué. Masque mortuaire en voie de décomposition ?

Les fauves


1H45 à Chaillot en compagnie de 10 jeunes qui parlent d'eux, de leur rapport à cette vie que nous (les vieux) avons mise en place, qui s'interrogent sur ce que signifie être jeune, comment être adulte, ce que cache le temps qui passe, et aussi une multitude de questions sur la relation à l'autre, la sexualité, les impasses, les fautes indispensables pour progresser (ne serait-ce pas ce qui s'appelle l'expérience ?) ; tous ces dialogues - pour certains improvisés - alternent avec des chansons, des musiques techno ou rap et des danses hip-hop vertigineuses.
Dans un décor très minimaliste - un écran sur lequel défile des slogans relatifs à des attitudes de la vie, deux horloges digitales, une table de mixage derrière laquelle officie DJ Gianfranco Poddighe (un "vieux" de 50 ans) - on assiste à un excellent moment de théâtre non conventionnel, intense, plein d'humour, de tendresse.
Le réalisateur, Michel Schweizer, est le 2ème adulte (ou "vieux") présent sur scène. Il est chargé de faire parler ces "fauves" ; ce qui est d'ailleurs l'objet de la pièce. Mais les "fauves" s'émancipent très rapidement.
En final, la question que peut se poser le spectateur : ces jeunes, sont-ils si différents de nous quand nous étions jeunes ? Où se loge (parfois ? souvent ?) l'incompréhension ?
Une petite déception : que les textes qui défilent sur les écrans et qui sont dits (hors impros) ne soient pas disponibles.

mercredi 2 mars 2011

Jane Russell



"La culture, c'est d'être capable de décrire Jane Russell sans utiliser les mains" disait l'acteur Bob Hope. Cette volcanique brune qui nous fit tous fantasmer vient de mourir. Comment est-ce possible ? Comment pouvait-elle avoir 89 ans ? Le temps est intraitable !

La pitié dangereuse


La dernière page de l'unique et long roman de Stefan Zweig achevée, il est difficile de ne pas rester un long moment sous l'emprise de cette histoire troublante qui met en scène un jeune officier de cavalerie (le narrateur) qui provoque, malgré lui, un amour aussi intense que destructeur chez une toute jeune femme (elle a 17 ans) paraplégique. L'auteur interroge le regard "discriminateur" que les êtres "normaux" ont sur les infirmes ; ce regard qui condamne, catalogue, ostracise la personne handicapée. Elle-même, comment peut-elle ne pas se révolter puis se désespérer quand le seul sentiment qu'elle peut inspirer se réduit à la pitié ?
Zweig révèle une nouvelle fois dans ce roman son gout pour l'ambivalence ; le récit alterne entre des périodes d'euphorie et de doutes sombres ; la méchanceté et l'égoïsme succèdent à la bonté et à la tendresse, les instants de folie aux passages d'innocence. Les sentiments opposés coexistent en l'homme, et l'âme en apparence la plus noire peut être l'instant d'après animée des meilleurs sentiments. Qui a dit :
"Le roman est aujourd'hui le seul observatoire d'où l'on puisse considérer l'espèce humaine dans sa totalité."* ?
Seulement aujourd'hui ? Hier également ; pour les plus grands.
* Ernesto Sabato (Écrivain argentin)